« Quand j'entends le mot vivre, je sors mon revolver ou du poison. » (Luc Pulflop)
vendredi 28 décembre 2018
Tentative désespérée
À l'approche imminente du trépas, il n'est pas rare que le Dasein s'écrie : « C'est un malentendu ! Il y a maldonne ! Je suis le créateur John Galliano ! » — mais c'est en vain : bon gré mal gré, il doit bientôt se faire à sa nouvelle condition de de cujus. Il est, comme on dit, « décédé ».
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Rien de nouveau sous le soleil
Comme l'a remarqué Démocrite, « les porcs se vautrent dans le fumier ».
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Du sacrifice de rouquins
26 octobre. — Plutarque rapporte (d'après Manéthon, dit-il) qu'en Égypte, à certains jours, à Eléthya en Thébaïde, on brûlait vifs des hommes qu'on appelait typhoniens, et qu'on jetait leurs cendres au vent. Diodore de Sicile rapporte aussi qu'anciennement, les rois d'Égypte sacrifiaient sur le tombeau d'Osiris des hommes de la couleur de Typhon, c'est-à-dire des « rouquemoutes ».
(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)
Un ours
L'homme du nihil ne supporte aucune compromission avec le « fétide et rébarbatif réel ». Il doit parfois en absorber un élément fortuit, imprévisible, une écharde, mais il n'est jamais altéré que par violence. En outre, il cherche subito presto à expulser l'intrus de sa pachyméninge. Il ne l'accepte jamais que comme une brimade qu'il doit passagèrement tolérer. Comme il préfère l'intégrité géométrique du nihil au radotage et à la belote, il n'a pas d'amis et passe pour un être profondément asocial.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Pêche à la foëne
20 novembre. — La foëne est très utilisée pour la pêche des anguilles, dans les flaques d'eau laissées par la marée descendante, ou encore dans les herbiers ; en effet, comportant de nombreuses dents (sept, par exemple, voire neuf), la foëne permet de capturer aisément ce poisson, difficile à saisir autrement.
(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)
jeudi 27 décembre 2018
Couleur optique
Sur les ailes de certains papillons, par exemple le Mars changeant — mais on pourrait également citer le morpho —, le gris poussière du Grand Tout bascule d'un coup dans le bleu électrique du Rien suivant l'incidence de la lumière. De telles métamorphoses n'ont rien pour étonner l'homme du nihil : que la morosité le prenne, qu'il soit exposé à l'idéalisme fichtéen, et un banal flacon de taupicide lui paraît soudain un chatoyant paradis.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Déroute existentielle
Les vertus laxatives de l'heure font du suicide une orge pressante, trop pressante.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Présent de l'hyène
18 novembre. — Une hyène apporta un jour son petit, qui était aveugle, à Saint Paphnuce, qui le guérit ; le lendemain l'hyène apporta au saint une grande peau de brebis, qu'on appela le présent de l'hyène ; Paphnuce la donna à Sainte Mélanie l'aïeule. (Pallade, Hist. Lausiaque, l. VIII, c. 20).
(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)
Langage
Le nihilique trouve dans la rigueur du langage un garde-fou salutaire contre le laisser-aller qui procède sournoisement de l'idée du Rien. Il se défend d'ajouter aux mots des suffixes qui rendent nécessaire de délibérer pour en saisir le sens. Il prise la sobriété dans le syntagme comme en toute chose. Ainsi, il ne parvient pas à croire qu'un mot de plus de quatre syllabes soit nécessaire pour signifier la notion capitale de pachynihil.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Synthèse
Je voudrais que ma vie se résumât à un mot — celui zingibéracé.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Les bêtes aussi
31 décembre. — Le gloméris, animal arthropode voisin du cloporte, peut se rouler en boule, tandis que le réduve est un insecte hémiptère carnassier dont la larve se cache dans la poussière.
(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)
mercredi 26 décembre 2018
Beau sexe
Autre caractéristique de l'homme du nihil : la fascination et le recul devant l'immensité spongieuse de la femme, qu'il imagine, on ne sait pourquoi, « gorgée de miasmes, de pestilence, de fermentations délétères ».
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Heautontimoroumenos
L'individualité irréfutable du « Suisse » fait du sujet déféquant un bourreau de soi-même, un heautontimoroumenos.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Une histoire à peine croyable
17 novembre. — Capitolin raconte que Maximin le fils, encore jeune, ayant été invité à la table de l'empereur Alexandre Sévère, et n'ayant point d'habit de table, on lui en donna un de la garde-robe de l'empereur.
(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)
Réel fossile
L'homme du nihil n'aime la « réalité empirique » que broyée — si possible réduite à un tas de sciure — ou fossile — quand le temps a enfin saturé de silice ses fines cellules. L'état pétrifié est à vrai dire celui qu'il préfère. Changé en pierre, le rébarbatif réel n'a plus les odeurs nauséeuses de la forêt après la pluie, mais une seule et pour toujours : celle du Rien, plus délectable que les effluves insinués du santal et que ceux suaves et douceâtres du cèdre.
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
Brrr !
Rien n'égale la glaçante étrangeté de cette révélation : la sarigue est pédimane.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Page de journal
16 novembre. — Ce n'est que fort tard que les Romains montrèrent des hyènes dans les jeux du cirque. D'après Jules Capitolin, c'est l'empereur Gordien le jeune qui, le premier, dans le premier tiers du troisième siècle de notre ère, montra, à Rome, dix de ces animaux, à l'occasion de son triomphe sur les Perses.
(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)
mardi 25 décembre 2018
Réminiscence
Étang de Soustons, deux heures de l'après-midi. Un peu à l'écart, un suicidé philosophique échafaude impunément ses losanges de bronze dans la stupeur solaire. L'hygrométrie de l'air est nulle. Pas une goutte d'eau non plus à terre, dans une épaisseur hostile de verre pilé. — Suicidés philosophiques, victorieux des mers et des déserts, qui suscitez, de nos jours encore, d'étranges témoignages sur votre pouvoir de résistance et de prolifération, je vous salue !
(Théasar du Jin, Carnets du misanthrope)
La vérité sur les féculents
Progressons dans la voie du suicide : enfermons tout l'encéphale dans une pluche de pomme de terre.
(Luc Pulflop, Prière d'incinérer. Dégoût)
Conversation avec un lama
19 novembre. — « Tu dis que Bouddha est unique ; dans ce cas-là, que seront le Talé-Lama de Lhassa, le Bandchan-Remboutchi du Djachi-Loumbo, le Tsong Kaba des Sifan, le Kaldan, le Tolon Noor, le Guison-Tamba du Grand-Kouren, de Hobilgan, de la ville-Bleue, les Houtouktou de Péking, et puis tous ces nombreux chaberons 1, qui résident dans les lamaseries de la Tartarie et du Thibet ? — Tous sont également Bouddha. — Je ne m'en mêle plus. »
1. En style lamanesque, nous dit le Père Huc, on nomme chaberons tous ceux qui, après leur mort, subissent des incarnations successives ; ils sont regardés comme des Bouddha vivants.
(Barzelus Foukizarian, Journal ontologique critique)
Inscription à :
Articles (Atom)