vendredi 19 juillet 2024

Une difficile extraction

 

D'après Heidegger, il n'y a pas que les sardines qui sont serrées au fond de cette boîte, il y a aussi... l'Être ! Et pour l'extraire, ça ne va pas être de la tarte. Ça ne va pas se faire en soufflant dessus.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Un chansonnier de l'apocalypse

 

Clément d'Alexandrie dit que l'apôtre Jean fut exilé dans l'île de Patmos en 94, à la suite de persécutions contre les chrétiens, et que c'est là qu'il écrivit l'Apocalypse. Dans ce texte prophétique, c'est, selon l'apologète alexandrin, le Diable lui-même, le Diable en personne, le « dragon », qu'à force de flatteries Jean amadoue. Par contre, Clément ne dit rien de Jean Bertho.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Caractère soupçonneux du Grandiloque

 

Cioran était d'une nature si soupçonneuse qu'il allait jusqu'à soupçonner l'horconia de Pline d'être la même chose que l'arelaca de Columelle. Simone Boué lui disait qu'il « yoyotait » mais il ne voulait pas en démordre.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Jeanne-Claude pêche la coquille

 

Avec les revenus de son art, le plasticien Christo s'était acheté une modeste maison de vacances à Lamballe (Côtes-d'Armor). Quand il y allait avec son épouse Jeanne-Claude, celle-ci en profitait pour pêcher la coquille Saint-Jacques et le pétoncle dans la baie de Saint-Brieuc.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

jeudi 18 juillet 2024

Embaumement fécal

 

Cornélius Népos raconte qu'à la mort d'Agésilas ses amis l'embaumèrent avec de la cire, à défaut de miel. Et là, on est obligé de se poser la question : s'ils n'avaient pas eu de cire, ç'aurait été quoi, de la merde ? Le monstre bipède n'a honte de rien !
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Surdité de Robigus

 

Le dieu Averruncus était celui que les Romains invoquaient pour détourner de dessus leur tête les maux dont ils étaient menacés. Aulu-Gelle dit qu'on l'appelait encore Robigus. Interpellons-le, pour voir. « Hé ! Robigus ! Gars ! T'as une banane dans l'oreille ! » — Pas de réponse.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Nos affections

 

Si nous faisons le bilan de nos affections, nous constatons que nous n'aimons personne, hormis quelques Russes morts. C'est un triste bilan, mais est-ce notre faute si des non-Russes et des non-morts il n'y a rien à tirer ?
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Les adamiques et les simiesques

 

Chestov émet quelque part l'hypothèse que certains hommes, peu nombreux, descendent d'Adam, tandis que la plupart descendent du singe. Il ne cite pas nommément le chanteur Claude Nougaro, mais on ne peut se défendre d'y penser.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

mercredi 17 juillet 2024

Relents haschichins

 

Quand on lit Le Procès, La Métamorphose ou Joséphine la cantatrice, on ne peut s'empêcher de se demander si Kafka ne fumait pas de la « beuh » ou du « shit » pour inventer des histoires aussi baroques. Cela ferait de lui un précurseur de Jacques Kérouac et des poëtes de la « Beat Generation », et ce ne serait pas très glorieux. Encore heureux qu'il ne consommait pas des « champis » ou du péyote. Cela eût fait de lui un successeur de George Sand ou un précurseur du « Mômo » !
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Hégélianisme

 

Georges Hegel prétendait démasquer le véritable concret en dissolvant les concepts abstraits, mais soit malchance soit maladresse de sa part, tout ce qu'il parvint à démasquer, c'est de la révérence parler merde !
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Un odieux stratagème

 

Quand un Polacre veut que vous caressiez un chien, il vous dit quelque chose du style : « Tchèba pogouascatch tègo psa. » C'est le moment ou jamais d'être sur ses gardes. Cela peut être un stratagème pour vous faire écouter du Chopin ou lire du Mickiewicz !
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Un bon début

 

Dans le volume 15 du Bulletin agricole du Congo belge et du Ruanda-Urundi, on peut lire que les fruits de la courge-torchon fournissent l'éponge végétale, et qu'on peut s'en servir pour laver la vaisselle. C'est toujours un souci de moins — mais il reste la temporalité du temps, la mortalité de l'être mortel... et les bonnes femmes à gros fiak.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

mardi 16 juillet 2024

À l'aise nulle part

 

On peut avoir l'intime conviction d'être un pilchard et pour autant ne se sentir à l'aise ni dans la famille des gymnopomes ni dans celle des malacoptérygiens abdominaux. Quand c'est comme ça, il vaut mieux ne pas trop fréquenter les coquetèles.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Tribulation

 

Le 22 février 1913, Léon Bloy note dans son Journal : « Tribulation parfaite. » Et c'est ça. C'est exactement ça — la vie. Une tribulation parfaite. — Si tant est, évidemment, que quelque chose puisse être parfait en ce « monde de néant ».
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

lundi 15 juillet 2024

Se perdre à Zurich

 

Kafka nous émeut au suprême quand nous lisons dans son Journal, à la date du 27 août 1911, la note : « Achat d'un plan de Zurich. » Est-il pour l'homme, en effet, perspective plus angoissante que celle de se perdre à Zurich ?
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Fort de café

 

Lucien dit qu'aux jeux des Thanatusies, il n'y avait pas de prix pour le pancrace. On se pince. Pas de prix pour le pancrace ! Et pour la connerie, il y avait un prix ? 
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Betterave ou melon ?

 

D'après Émile Cioran, la plante qui récompense le mieux les peines du cultivateur est la betterave molle du désespoir. Dupuits de Maconnex en revanche dit le melon.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Debout, les congres

 

Ce n'est pas aux damnés de la terre qu'il faut ordonner de se lever, c'est aux congres, ces poissons anguilliformes dépourvus de nageoires pelviennes, à la mâchoire supérieure saillante, qui vivent sur les fonds rocheux et sableux. Congres ! Debout ! Paix entre nous ! Mort aux tyrans !
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

dimanche 14 juillet 2024

Ensâblé !

 

Sur ce point, Heidegger a raison : avec l'étant existant, rien ne change, c'est toujours la même histoire. Il fait le fanfaron, il conduit sans les mains, roule à côté de la piste et se retrouve ensâblé dans le fech-fech. Et alors, en avant les pelles et les tôles. Pauvre insensé ! Fou ! De conduire sans les mains !
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Métempsycose

 

Un fragment d'Empédocle d'Agrigente dit : « J'ai été jeune homme, jeune fille, arbustre, oiseau et poisson muet surgissant de la mer. » Il ne précise pas quel arbustre il a été, et c'est dommage car ç'aurait été intéressant à savoir. Peut-être un forsythia ?
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Bacchante aux raisins

 

Un Bourdelle innommable est une statue de Bourdelle à laquelle, avec la meilleure volonté, il n'est pas possible de donner un nom — une œuvre de Bourdelle qui résiste à la dénomination.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

La vie comme dramaturge

 

La vie sait construire des intrigues et inventer des rebondissements ; grâce à la femme et à ses « biberons Robert », elle évite l'écueil de l'uniformité. Nous ne lui ferons qu'un reproche de détail : de temps en temps, elle appuie trop.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

samedi 13 juillet 2024

Bourrelle

 

Quand il s'agit de tourmenter un pauvre bougre qui lui a prétendument manqué de respect en la comparant à un hippopotame, la femme montre une obstination dans la férocité dont même le règne animal — avec ses poissons-vipères, ses béryx et ses baudroies — n'offre que de rares exemples.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Lui aussi

 

« Étant de Soustons, deux heures de l'après-midi. Je ramais. » (Martin Heidegger, Gesamtausgabe 38, Logik als die Frage nach dem Wesen der Sprache)
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Désenchantement mathématique

 

Une algèbre de quaternions n'est pas toujours un corps, même si on ne considère que le cas non dégénéré. Alors imaginez un peu si on considère le cas dégénéré... Non, la vie, ce n'est pas la peine... Le négateur avait raison.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Absence de gueulage chez Kafka et consorts

 

Les Kafka, les Pessoa, les Kierkegaard, tous ces auteurs geignent, ils pleurnichent, mais ils ne gueulent pas. Ils ne traitent pas le réel de pot de pisse ou de bande de salops. Cioran non plus, trop occupé à ramer sur l'étang de Soustons et à faire des astuces. Pourquoi ne gueulent-ils pas ? À quoi ça rime ? Ils ont peur de se faire mal voir ou quoi ?
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

vendredi 12 juillet 2024

Un boute-en-train

 

Retranché dans ses rêveries, l'écrivain Pessoa rédigeait le journal de bord fragmenté d'une collection de sensations qu'il se risquait parfois à appeler existence. Le problème est que chaque fois qu'il le faisait — chaque fois qu'il appelait existence cette collection de sensations —, cela provoquait l'hilarité de ses copains de bistrot : « Sacré Fernando, va, toujours le mot pour rire. »
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

Sus à l'absurde camusien

 

L'angoisse de vivre, l'inquiétude de se sentir seul dans un univers incompréhensible, tout cela peut parfois se guérir par un « coup de mousseux » et quelques petits gâteaux feuilletés.
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)

jeudi 11 juillet 2024

Oui-Oui visite les Enfers

 

« Alors Oui-Oui demande à Potiron de l'accompagner par-delà les affreux rivages et les rauques torrents du Cocyte mais Potiron refuse, il dit que ça lui fout trop les jetons. »
 
(Lucien Ganne, Syllogismes de la mer Rouge)